dimanche 15 mai 2011

❛Concert & Disque❜ Antonio Vivaldi, "Rivale des Castrats" & "Prima Donna" • Nathalie Stutzmann version 2.0, ou la Voix-Orchestre.

C'était il y a vingt ans déjà : un jeune contralto du nom de Nathalie Stutzmann inaugurait sa collaboration avec RCA par un album dédié à… Vivaldi. Si la pâte guère philologique de Spivakov peut aujourd'hui y prêter à sourire, le choix du Stabat Mater par l'artiste trahissait une disposition baroque qui n'allait jamais se démentir. Au long d'une carrière éclectique et foisonnante (qui la mène jusqu'à cet Elephant Man composé pour elle par Laurent Petitgirard), nous retrouvons en effet régulièrement les noms de Bach, Händel, Pergolesi, Hasse... et du Prêtre Roux. Nulle discontinuité, par conséquent, si ce dernier porte aujourd'hui sur les fonts baptismaux le premier disque – estampillé «étiquette jaune» – de l'ensemble Orfeo 55, fondé en 2009 par la cantatrice, disque dont le récital parisien du 5 mai 2011 se veut bien sûr la vitrine promotionnelle.

Six airs, parmi les quinze figurant dans le recueil, cela peut sembler modeste. Toutefois, Stutzmann débutant aussi avec cette phalange une carrière de chef d'orchestre, il lui est judicieux de mettre les instrumentistes en valeur, avec rien moins que deux concerti, à quoi s'ajoute une sinfonia (l'Olimpiade, de son côté enregistrée). Au RV578 pour deux violons et violoncelle, tiré de l'Estro armonico, d'ouvrir le bal. À froid, très carré, n'offrant qu'une frange du mystère que le sol mineur appelle, l'Adagio e spiccato déçoit légèrement. En revanche – malgré une vigueur plutôt totalitaire du premier violon de Thibault Noally – le cours de l'œuvre séduit autant par la netteté d'articulation que par la mise en valeur de lignes mélodiques claires et bien détachées, quoique homogènes. N'y paraît pas étrangère la gestique, aussi élégante que précise, de la cheffe, attentive en outre à ce que vélocité ne soit pas confondue (comme parfois en tel répertoire) avec hystérie.

Ce travail à la pointe sèche fait encore merveille dans le RV493 pour basson, au début de la seconde partie : d'une exquise poésie (quel Largo !), il offre des sonorités raffinées et étales, comme pesées au trébuchet. Un peu trop, sans doute, de la part du bassoniste Alexandre Salles dont le trac tangible paraît la cause d'une émission plutôt molle et timorée. Point de retenue, à l'inverse, dans le court triptyque liminaire de l'Olimpiade, joliment contrasté, et surtout nanti de touches fruitées dans sa pulsation bondissante, dépourvues de toute astringence. Pour un groupe aussi juvénile (qui signa ici même voilà quinze mois sa première prestation parisienne, Vivaldi déjà), cela vaut certes mieux qu'un accessit. Quid, cependant, de l'opéra, puisque sa tutrice se fait désormais apprécier en dirigeant son propre chant ?

Loin du glamour tape-à-l'œil que risque une certaine surenchère vers des aigus vendeurs – et forte d'un organe charnel, rond et sonore qui a fait son renom, la musicienne a laissé Frédéric Delaméa placer son offrande sous le label astucieux de "Rivales des castrats". Autant une démarcation bien comprise qu'une intelligence fine du positionnement du Prete Rosso quant à la furia napolitaine, ses outrances et ses coûts. Et plus organiquement, une osmose : tant la dilection attestée du Vénitien, pour la voix d'alto féminin, a pu se traduire dans des pièces d'orfèvrerie nombreuses. Par exemple, l'étonnant Sovvente il sole (Andromeda liberata) avec violon obligé, habilement disposé en fin de programme. Hymne ? Complainte ? Duo d'amour pour contralto et archet ? Cette pièce, remise à l'honneur voici une petite décennie par Andrea Marcon, ne nous a jamais paru sonner avec tant d'ambiguïté et d'intensité, les mélismes ici sobres de Noally faisant écho à la mélancolie exhalée par Stutzmann. Quel grave tellurique - jailli d'une sorte d'Erda baroque - juste avant le da capo !

Il est à noter qu'un seul air véhément est proposé (efficace mais canalisé Gemo in un punto, de l'Olimpiade), ce qui est d'une grande éloquence quant au refus affiché d'effet. Pudeur, même : à rebours d'une imagerie assez emphatique collée aux basques de Vivaldi, la cantatrice fait assaut de tact. Imposant l'expressivité la plus nue (Sento in seno, Giustino), la mâtinant de tendresse et d'humour (Lascia almen, un air tout juste retrouvé de La Costanza trionfante), elle dose dans Io sento in questo seno (Arsilda regina di Ponto, autre sommet) des décolorations lancinantes qui clament au passage le métier de la diseuse, de la Liedersängerin. Nous ne lui tiendrons donc pas rigueur d'un premier bis mitigé, redoutable Face di Megera (Semiramide) pris bien bas, très vite et caricatural ; tant l'Atenaide qui suit (Cor mio, che prigion sei, chastement ourlé de pizzicati) renvoie sans contredit aux cimes un instant délaissées.

Sans doute la démonstration aurait-elle encore gagné en impact avec l'Ho nel petto de Giustino, à l'enivrant lacis de psaltérion, et dont l'absence ici paraît franchement inexplicable. D'autant plus que ce joyau figure au menu du disque (de bout en bout exceptionnel) cité plus haut. Il faudra malgré tout s'en dispenser. Qu'importe, en dépit de réserves très minimes, l'essentiel nous a été conté. En sus de la fuligineuse beauté de son chant, Nathalie Stutzmann dispose d'une si manifeste autorité, que nous n'avons pas imaginé une seule seconde cet empire cesser lorsque, tournant le dos à sa troupe, elle offrirait sa mélopée à l'auditoire.

Fascinante alchimie : Orfeo 55 n'a pas deux ans, et déjà si riches de postérité sont les linéaments d'un tel magistère.

 un texte de Jacques Duffourg.

L'article original publié sur Anaclase peut être lu ICI .

Paris, Salle Gaveau, 5 mai 2011 - Rivales des Castrats, un programme Vivaldi préparé par Nathalie Stutzmann & Orfeo 55, avec Thibault Noally, Patrick Langot & Alexandre Salles - Concertos, & airs de l'Olimpiade, Andromeda liberata, Giustino,
La  costanza trionfante, Arsilda regina di Ponto, Semiramide, Atenaide.

Le CD Deutsche Grammophon propose en outre, parmi vingt-quatre plages, des extraits d'Orlando Furioso, Juditha Triumphans, Tieteberga & Teuzzone.

À consulter avec profit, le site de Nathalie Stutzmann.

Crédits iconographiques - Deutsche Grammophon Gesellschaft  - Ospedale della Pietà -
Nathalie Stutzmann par J.-F. Leclercq.

jeudi 5 mai 2011

❛Concert❜ I Virtuosi Delle Muse au Théâtre des Champs-Élysées • Vivaldi, Farnace ritrovato

Quelques semaines après Orlando Furioso, le Théâtre des Champs-Élysées propose, en cette toute fin d'avril, de remettre le couvert vivaldien avec Farnace, cette fois en version de concert : un opéra au canevas antique rodé (les vicissitudes de Pharnace, roi du Pont, fils de Mithridate, combattant Pompée et la reine de Cappadoce Bérénice), qui fut en son temps le plus joué de tous ceux du compositeur. Sans aucun doute ce dernier était-il conscient de la haute qualité de son corpus, puisqu'il n'hésita pas à le remettre sept fois sur le métier, au long de onze années de vie créatrice (1727-1738). De Venise à Mantoue, de Pavie à Trévise, Ferrare et même Prague, en avisé impresario de son propre labeur, le Prêtre Roux s'adonna ainsi à un impressionnant nombre de variantes, sans doute au-delà de la moyenne d'une époque pourtant peu chiche de remplois, transpositions et autres pasticci.

Autant que d'importantes modifications textuelles – que seuls deux manuscrits autographes (1731,1738) permettent de pointer avec précision –, ce sont aussi des oscillations récurrentes dans la tessiture du rôle-titre (de contralto à ténor) qu'attestent les programmes des théâtres. La lecture des Virtuosi delle Muse, phalange baroque fondée en 2004 par Stefano Molardi et Jonathan Guyonnet, est d'autant plus attendue que nous ne comptons au catalogue qu'une seule recension discographique : une captation faite en 2001 à Madrid, d'un Jordi Savall qu'on a connu plus heureux... inexplicablement reprise dans l'intégrale Naïve. Au choix aberrant d'un baryton en Pharnace se joignent, hélas, acidités vocales, direction passe-partout et prise de son hasardeuse. Autant dire que nous partons d'extrêmement peu.

Stimulante fraîcheur, de fait, que ce roulement de timbales ouvrant avec le plus grand naturel le Tempo primo de la Sinfonia. Martiale sans raideur, cuivrée sans dureté, celle-ci éblouit d'emblée par des cordes félines dont la cambrure incisive (le diapason est bas), la vélocité et l'imagination dynamique vont faire merveille au long de la soirée. La version retenue reposant pour l'essentiel sur des airs tripartites, l'invention instrumentale se montre d'autant plus nécessaire qu'un simple jeu sur les coloris ne peut nourrir plus de trois heures de musique en coupe réglée ! Heureusement, Farnace, s'il illustre à l'envi tous les affects baroques en vogue, comporte des archétypes évoluant avec suffisamment d'habileté pour que s’y puisse ouvrager une authentique dramaturgie.

Avec ce que cela peut exiger d'hyperbole : exemple parmi tant, l'aria di furore de Bérénice fermant ici l'Acte II, Lascerò d'esser spietata, pris à toute allure, où les traits de la cantatrice sont assortis de tonitruants riffs de théorbe. Ou l'entrée poignante de Gilade, un Nel intimo del petto aux tenues virtuoses de cors, serties en un crescendo à l'effet très sûr. Remarquable, en outre, est le travail dramatique effectué sur les récitatifs, secs ou accompagnés : parmi ceux-ci, le déchirant O figlio, o troppo tardi nato de Tamiri, épouse de Pharnace (fin du I). Ce personnage développé ayant à plusieurs reprises échu à la favorite Anna Tessieri Girò, on imagine le soin que Vivaldi porta à sa partie. La Sicilienne Josè Maria Lo Monaco y déploie, de son mezzo ambré et sombre, un phrasé envoûtant et un souffle sans faiblesse qui lui valent un score mérité à l'applaudimètre.

Moins consensuelle se révèle Maria Grazia Schiavo (Bérénice), une Napolitaine rompue à la coloratura baroque. Convenons que l'énergie de la dame irradie au prix d'aigus acerbes et peu royaux (même dans le calme Langue misero quel valore) ; sachons-lui gré toutefois d'user d'un abattage et d'une technique arraisonnant crânement un rôle fort périlleux. Comme l'est celui de Gilade, capitaine de la garde de la reine, dévolu à Sabina Puértolas : cette Espagnole au cursus versatile s'appuie sur un timbre fruité, un grand sens du mot et un port gracieux pour contraster avec goût la riche dotation musicale d'un caractère assez pâle. Son exquis Quell'usignuolo, déroulant ses vocalises sur un paragone usé jusqu'à la corde, est offert avec un second degré si mutin qu'un franc succès lui est acquis.

Selinda, sœur de Pharnace et passable entremetteuse, trouve encore en Raffaella Milanesi une interprète délicate, quoique limitée par une projection modeste. Timide également paraît le ténor Anders Jerker Dahlin en Pompée : le matériau est agréable mais, réduit au conventionnel Roma invitta, le général romain est sans nul doute le protagoniste sacrifié. En revanche, Emiliano Gonzalez Toro (Aquilius, bras droit du précédent), souvent apprécié du public hexagonal, régale d'aigus capiteux et ciselés au cours de ses deux airs – surtout dans l'ardu Alle minacce di fiera belva, l'un de ces parangons de chasse aux irrésistibles appels de cors.

Une galerie de talents enfin renforcée par l'éclat de Sonia Prina (ci-contre) dans les habits du roi du Pont : fort en Vivaldi d'éloquents états de service, le contralto lombard  est ici en démonstration. Son métal androgyne sied à merveille à ce type d'emploi, de même que son autorité native, dès l'initial Ricordati che sei, idéalement péremptoire. À quoi s'adosse une agilité aussi percutante qu'expressive, malgré le tempo peu complaisant d'un Quel torrente ou d'un sidérant Gemo in un punto... importé de L'Olimpiade. Évidemment c'est l'aria d'ombra de l'Acte II aujourd'hui bien connue, Gelido in ogni vena, qui vaut à cette immense artiste, par son jeu fouillé d'inflexions angoissées et délétères, un clair triomphe.

Cette page admirable s'avère au surplus exemplaire de l'entente entre tous ces jeunes intervenants : Molardi, Guyonnet et les leurs réussissent à demeurer tout au long de la soirée d'une présence appuyée (l'invention évoquée plus haut), sans pour autant mettre en danger des chanteurs très exposés par d'intrusives rodomontades. Jusqu'au lénifiant chœur final qui nous touche : un vrai miracle d'équilibre, en somme.

Les amateurs d'opéra vivaldien seront à la fête dans cette même salle la saison prochaine, puisqu'à un second Farnace d'affilée, cornaqué cette fois par Fasolis et ses Barocchisti, s'ajoutera un Giustino dû à ces Virtuosi delle Muse... À nos agendas !



 L'article original publié sur Anaclase peut être lu ICI.

Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 28 avril 2011 - Antonio Vivaldi (1678-1741) : Farnace, dramma per musica (édition critique de Bernardo Ticci) - Sonia Prina, Maria Grazia Schiavo, José Maria Lo Monaco, Sabina Puértolas, Raffaella Milanesi, Emiliano Gonzalez Toro, Anders J. Dahlin - I Virtuosi delle Muse : Jonathan Guyonnet (premier violon), Stefano Molardi (clavecin & direction).

À consulter avec profit, le site d'I Virtuosi Delle Muse.

Crédits photographiques - I Virtuosi delle Muse, Guillaume Eymard Photographisme -
Sonia Prina : non communiqué.

lundi 2 mai 2011

❛Concert❜ Anne Sofie von Otter & Leonardo García Alarcón, Cappella Mediterranea • "I have a Baroque Dream !"

Il est, à l'issue de concerts de très haute tenue, des bis qui sont professions de foi. Entendre Anne Sofie von Otter proposer, de son français impeccable, de « revenir à ses racines » en s'intégrant au Chœur de la Cappella Mediterranea pour le serpentin Wretched Lovers d'Acis and Galatea est, à cet égard, exemplaire. Si les années d'apprentissage du mezzo suédois se firent en effet à la double enseigne du chant choral et baroque, c'est en réalité tout au long de sa splendide carrière que l'artiste a mis en valeur des projets d'équipe, sur scène comme au disque. Qui ne se souvient du Rendez-vous with Korngold, du Gala Offenbach ou de La Bonne Chanson ?

Faire équipe, donc, et défendre avec celle-ci un projet, ce n'est pas seulement s'insérer dans un groupe ou faire se succéder des solistes invités, si admirable que cela soit. C'est aussi donner du sens, en échafaudant un programme qui ouvre des perspectives, en recherchant assonances et accointances originales. C’est créer un jeu de miroir entre des époques, des écoles et des styles qui se complètent et se répondent, enfin tisser une complicité forte avec l'ensemble associé - autant une intelligence textuelle qu'une harmonie de couleurs. Une ambition qui s'est nouée voici peu avec Leonardo García Alarcón, au détour de préparatifs d'Ombre de mon amant.

Ce Baroque Dream inauguré à Ambronay reprend d'ailleurs la partie Charpentier (Médée) du récital français offert il y a peu avec Les Arts Florissants. À quoi se joignent Monteverdi et Strozzi, Purcell et, en conclusion, Händel. Les affinités de Von Otter avec le premier sont anciennes et notoires, particulièrement illustrées par L'incoronazione di Poppea dont elle fut une Ottavia remarquée et, surtout, un Nerone mémorable à Aix-en-Provence. Non encore proposée au théâtre, la Penelope du Ritorno d'Ulisse in Patria (Di misera regina) en impose d'emblée par un talent de diseuse absolument intact : chaque mot-clé y est mis en valeur de manière suggestive, dans un respect absolu d'une ligne musicale parfois ténue, où seules peuvent se regretter quelques superfétatoires mimiques et contorsions.

Plus libre, plus détendue – et même habitée d'un soupçon d'ironie – apparaît la locutrice du Che si può fare de Barbara Strozzi (portrait ci-dessus), dédramatisé mais obsédant, dans un balancement hypnotique à quoi les choristes ajoutent d'impeccables saillies. Ingrédients qui font encore le charme du monteverdien Si dolce è il tormento, précédé d'une introduction de viole de gambe à faire chavirer les sens... Une structure composite (et presque continue) que ce volet italien, lequel nous vaut au surplus une absolue démonstration de la Cappella Mediterranea dans le si complexe madrigal Hor che'l ciel e la terra, livré avec autant de netteté d'articulation que de beauté sonore, d'une intensité théâtrale sidérante.

La séquence Purcell, constituée pour l'essentiel d'une belle entrée chorale et du monologue onirique From the silent shades de The Fairy Queen – avec García Alarcón lui-même au clavecin –, en paraît par contraste d'autant plus rêveuse et poétique. La musique même des mots, nourrie de l'anglais subtil à souhait de Von Otter, y fait aisément pièce à un aigu désormais moins sûr, et en partie détimbré. C'est cependant la Médée de Charpentier qui, rapprochée des sessions Christie de 2009, recèle aujourd'hui le plus de périls : notamment au cours de la séquence (il est vrai abrupte) C'en est fait ! On m'y force où l'élocution légendaire se lézarde dans un tumulte assez confus. En revanche, le talent de la tragédienne compense aisément, tant les invocations Quel prix de mon amour et Noires filles du Styx, magnifiquement phrasées et très efficacement incantatoires, semblent personnifier la magicienne de Colchide. Passage à l'acte mis à part, voici une parenté insolite avec la Pénélope liminaire ! Les choristes sont toujours à leur avantage, dans des interventions très idiomatiques (L'enfer obéit à ta voix) que nous aurions volontiers goûtées plus démoniaques.

Ils demeurent à ce haut niveau – et toute la Cappella avec eux – dans un chapitre Händel principalement dévolu aux oratorios anglais. Ces derniers sont entre autres réputés pour leur « masse chorale » : de fait, ils ont parfois donné lieu à des mégalomanies surprenantes. Autant dire qu'avec huit protagonistes en tout, il y a pour Judas Maccabaeus et Athalia du dégraissage dans l'air. Le résultat convainc au delà des espérances par la clarté des différentes voix, ressortant avec une netteté de contour toute baroque (Leonardo García Alarcón est également à Namur chef de chœur, ne l'oublions pas). Plus encore, fascine le traitement en madrigal, superbe d'éloquence, convoquant à nouveau le Monteverdi initial dans un captivant écho.

Reste à la Suédoise le bercement un peu inhibé de Where'er you walk (Semele) et – retour à l'italianité – l'aria di paragone d'Agrippina, Ogni vento, livrée avec ce qu'il faut de rythmique chaloupée et de déhanchements mutins pour achever de conquérir la salle, par les voies de l'humour, du demi-caractère... et de quatre bis. Un Baroque Dream intensément applaudi, fédérant trois Nations au cours d'un siècle et demi de passions et d'ambiguïtés.S'il rappelle aisément par son répertoire la réussite de Lamenti ou Music for a while, nous disposons de prémices autrement plus patinées. Par exemple, un vénérable disque du Drottningholm Ensemble, à la prophétique gémellité de programme (Carissimi, Purcell, Scheidt, Monteverdi, Rameau) : au sein de l'Ängby Chamber Choir chantait déjà une Anne Sofie Von Otter âgée de... vingt-et-un ans. Prédestination à une martingale baroque.



L'article original publié sur Anaclase peut être lu ICI.

 A Baroque Dream, un programme de Leonardo Garcia Alarcon & la Cappella Mediterranea
avec Anne  Sofie Von Otter - Monteverdi, Strozzi, Purcell, Charpentier & Haendel -
Paris, Théâtre des Champs-Élysées, 27 avril 2011.

 À consulter avec profit, le site de la Cappella Mediterranea.

 Crédits iconographiques - Anne Sofie Von Otter &
Leonardo Garcia Alarcon : Bertrand Pechène (Académie dAmbronay).