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Sir Arthur Sullivan (1842-1900) |
Un peu l'Offenbach anglais, l'ami Sullivan - mâtiné d'un Arnold Bax encanaillé et annonçant l'opérette méconnue de Benjamin Britten, Paul Bunyan. La notoriété en ses terres de ce pince-sans-rire est due, quasi exclusivement, à ses nombreuses pochades conçues avec son inséparable librettiste Sir William Schwenck Gilbert (The Gondoliers, The Yeomen of the Guard, HMS Pinafore)... Et pourtant, à l'instar d'Offenbach, il souffrit d'être cantonné dans ce rôle d'amuseur public limité aux plaisanteries musicales. Il fut en effet entre autres l'auteur de Symphonies et d'un Grand Opéra romantique "sérieux", Ivanhoe, d'une inspiration foisonnante.
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Julie Fioretti et les enfants-choristes des écoles de Saint Quentin en Yvelines, © Jean-Julien Kraemer |
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Le chef David Stern, © non fourni |
Le défi, un concept que David Stern (ci-contre) semble décidément affectionner, est ici multiple. Raccourcie, transcrite pour petit ensemble, la partition "adaptée librement" perd le protagoniste Pish-Tush, tandis que les dialogues revus par Félix Pruvost sont en langue française. Selon la loi du genre, les chanteurs/acteurs ne se privent pas d'y intégrer des allusions contemporaines, voire franchement politiques, déclenchant connivence et hilarité dans la salle... Au peu de familiarité, donc, du public hexagonal avec ce répertoire, s'ajoute la nécessité de restituer un Japon d'opérette, sans excès de mièvrerie, dans le cadre si vaste de la Scène Nationale. Enfin, présentement, s'avère exigeante la magnifique volonté d'associer et intégrer, aux chanteurs professionnels et à l'Ensemble Vocal de Saint Quentin, des musiciens en culotte courte - puisque rien moins que quatre classes de niveau primaire de la Ville Nouvelle (photos de scène, ci-dessus/ci-dessous) sont en charge, sous l'autorité de Valérie Josse, des sémillantes parties chorales que l'ouvrage dispense à profusion.
De jolis costumes et quelques accessoires seyants permettent à Véronique Samakh de signer une mise en scène aimable et de bon goût ; à la recherche cependant, devant des décors congrus (2), d'une existence topographique crédible, sur un plateau dont le gigantisme est décidément piégeux. La remarque peut valoir pour le groupe de... neuf (!) instrumentistes, dont l'opiniâtreté à obtenir un son suffisamment souple et mousseux est, vu leur nombre, en lutte permanente avec la vacuité d'une fosse par contrecoup surdimensionnée, elle aussi. Par chance, au sein de cette transcription habile, le piano, de par sa polyphonie, opère les miracles attendus pour donner, en quelque sorte, le change orchestral.
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Le trio Three little maids : Luanda Siqueira, Aurélia Marchais, Julie Fioretti & les enfants, © J.-J. Kraemer |
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Jay Bernfeld, © www.fuocoecenere.org |
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Superbe version (sans les dialogues...) disponible ICI |

‣ Pièces à l'écoute simple, en bas de page ‣ Air d'entrée de Nanki-Poo (Anthony Rolfe Johnson) - Chanson de Yum-Yum (Marie McLaughlin) - Entrée du Mikado & Katisha (Donald Adams & Felicity Palmer ‣ Extraits de la merveilleuse lecture de Sir Charles Mackerras (illustration ci-dessus, © Telarc Records 1992).
(1) Supplice du pal pour l'Étoile, supplice de la décapitation pour The Mikado...
2) Noter l'immanence, au centre, de la guillotine : totem francisé figurant la donne scabreuse de l'action, basée comme on vient de l'écrire sur le quiproquo des décapitations.
‣ Saint Quentin en Yvelines, Théâtre, vendredi 25 mai 2012 -
Sir Arthur Sullivan, The Mikado, ou The Town of Titipu, opérette en deux actes (1885),
sur un livret de Sir William Schwenck Gilbert -
Adaptation libre sur une idée de Jay Bernfeld, conseiller artistique d'Opera Fuoco (livret revu par Félix Pruvost).
‣ L'Atelier Lyrique d'Opera Fuoco : Sebastian Monti (Nanki-Poo), Virgile Ancely (Pooh-Bah),
Jean-Sébastien Beauvais (Katisha), Douglas Henderson (le Mikado), Jay Bernfeld (Ko-Ko),
Julie Fioretti (Yum-Yum), Luanda Siqueira (Peep-Bo) & Aurélia Marchais (Pitti -Sing).
‣ Ensemble Vocal de Saint Quentin en Yvelines & Chœurs d'enfants des écoles primaires de la Ville Nouvelle (Trappes, Montigny le Bretonneux), direction : Valérie Josse -
Enseignants et classes (Plaisir, Sartrouville) associés à la production -
Mise en scène de Véronique Samakh, assistée d'Anna-Catherine Chagrot -
Enseignants et classes (Plaisir, Sartrouville) associés à la production -
Mise en scène de Véronique Samakh, assistée d'Anna-Catherine Chagrot -
Direction musicale : David Stern.
Ravie de prolonger la magie de ce spectacle grâce à la chronique si bien documentée de l'ami Jacques.
RépondreSupprimerUne soirée très émouvante, je trouve, par l'implication des enfants et de leurs familles présentes dans la salle, une belle aventure pour un travail exigeant et de qualité à la conquête d'un nouveau public... mission réussie !
Merci mille fois ma chère Clairette, qui m'accompagnas et enrichis de ton enthousiasme ce spectacle bien troussé... ♥ :)
SupprimerPartager de telles initiatives est très important, car à la réussite pédagogique (tous ces petits gosses multicolores qui apprennent, restituent, nous rendent meilleurs) s'adjoint une belle initiative musicale - même si la scène gigantesque de Saint Quentin a, je trouve, un peu noyé le sushi d'une production "artisanale" (au sens noble du terme) qui n'avait peut-être pas besoin de toute cette voilure...
On n'est pas assez "décoincé" sur l'opérette en France : nos amis Anglais ont là encore une belle longueur d'avance tant il est vrai que la musique serait bien triste si elle devait ne se limiter, ad perpetuam, qu'aux genres dits "sérieux".
Des genres qu'on adore, que je révère àl'envi - mais qui parfois, pour paraphraser "Wolfie" dans 'Amadeus', ont un peu tendance à... "chier du marbre" ! :))
Encore merci à toi, vivement la prochaine !!
Jacques