Un disque Paraty pouvant être acheté ICI |
Le Brésilien Marcos PORTUGAL (1762-1830, portrait plus bas), qui détient la clef de ces contrées exotiques est un quasi inconnu en France : la consécration des musiciens d'expression lusitanienne tardant largement à y venir (connaît-on seulement, pour ne pas dire joue-t-on, Luís DE FREITAS BRANCOS ?).
Science des contrastes, effets de miroir, tourbillonnants changements rythmiques : quelle surprenante musique des sphères ! Un exemple : au Chant d'entrée répondent en écho le Graduel, l'Alleluia et l'Offertoire. Ces trois derniers déroulent un somptueux plain-chant, une déconcertante mélopée, atemporelle, digne du Recordare de Kurt WEILL ou - j'irai encore plus loin - des Lamentations de Saint Jérémie d'Eřnst KRENEK...
Partition encore trop méconnue, éminemment lyrique, quoique parfois austère, elle jette un pont entre l'art grégorien et la polyphonie franco-flamande (se souvenir du magnifique recueil Roland DE LASSUS dû au même ENSEMBLE L'ÉCHELLE), tout en se livrant aux délices vocales du rococo. L'ensemble plonge dans une étrange lumière, quasi atonale. Visionnaire, génie protéiforme, Marcos PORTUGAL bouscule, bien avant KRENEK précité, nos repères, boussoles ou autres concepts ! D'une certaine manière, il annonce - avec quelque avance - l'ascèse brucknérienne ou... l'esthétique spectrale.
Bruno PROCOPIO dans la salle de l'Opéra de RIO DE JANEIRO - © Classique News |
Nous tenons là une œuvre paradoxale, atypique, d'une puissance inédite. Au gré de cette navigation musicale, le dépouillement y cède la place à un bel canto du genre le plus débridé, omniprésent, d'une rare inventivité. Ainsi se succèdent de spectaculaires feux d'artifice de vocalises extravagantes, des cascades de fioritures facétieuses, des enchevêtrements d'ornementations... fort éprouvantes pour les chanteurs.
Marcos PORTUGAL (1762-1830) |
Caroline MARÇOT - © N.P. |
De ce disque, chaque instant, chaque séquence est un pur enchantement, un miracle de subtilité. Le mérite en revient aux passionnés artisans d'un concert fort et prenant : le CHŒUR L'ÉCHELLE, sous la direction de Charles BARBIER pour le plain-chant et Quetzal, et de Bruno PROCOPIO (ci-dessus) chef invité pour la Missa Grande. Leurs atouts ? Sens de l'unité, de la cohésion, enthousiasme - exaltation même, tout cela se déployant avec une verve éblouissante.
La Cathédrale de CUENCA (Espagne), lieu de l'enregistrement - © www.spain.info/fr |
Quant au sublime chant de sortie, Quetzal (2002) de Caroline MARÇOT (ci-dessus), il se nourrit des clameurs de PENDERECKI, voire de WAINBERG ! Marginal, insolite, il est une captivante Leçon de Lumières, magnifié par un chœur en apesanteur. Un périple inoubliable.
‣ Pièces à l'écoute simple (lecteur DivShare, tout en bas de l'article) ‣ ① Chant d'entrée, Loquebar de testimonis tuis (plain-chant) ‣ ② Et resurrexit ‣ ③ Chant de sortie, Quetzal (2002) de Caroline MARÇOT ‣ © Label Paraty 2013.
‣ Marcos PORTUGAL (1762-1830) : Missa Grande - Caroline MARÇOT (née en 1974) : Quetzal.
‣ Luanda SIQUEIRA, Charles BARBIER, Karine AUDEBERT,
Hervé LAMY, Sorin Adrian DUMITRASCU, Frédéric BOURREAU.
Orgue historique de la Cathédrale de CUENCA (Espagne) : Olivier HOUETTE.
‣ CHŒUR L'ÉCHELLE - dir. (plain-chant) : Charles BARBIER - dir. (ensemble) : Bruno PROCOPIO.
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